La migration vers le cloud constitue un vecteur de transformation pour les entreprises. Mais lorsqu'un changement d'une telle ampleur se produit, les conséquences environnementales sont trop souvent négligées.
Le gaspillage des ressources est généralement lié à un manque de maturité dans la gestion des services cloud, mais aussi associé à de nouveaux usages tels que l’essor des services d’IA. Ces éléments ont une incidence significative sur l’explosion des coûts et l’impact énergétique. Face à ce constat, voici quelques réflexions et bonnes pratiques à mettre en place pour réduire au maximum l’empreinte environnementale tout en atteignant ses objectifs de durabilité.
Le dilemme environnemental du cloud
Lorsque l’on évoque le « cloud waste », on parle essentiellement de ressources mal utilisées ou inutilisées qui consomment de l'énergie sans créer de valeur. Les centres de données (datacenter) représentent déjà à eux seuls près de 4% des émissions mondiales de carbone, un chiffre qui ne cesse d'augmenter avec l’essor de l’intelligence artificielle. On comptabilise plus de 250 datacenters en France en 2025, et ce chiffre devrait doubler d'ici à 2030.
Avec l'essor de l'intelligence artificielle, cette problématique passe d'inquiétante à fondamentale. Les besoins énergétiques associés aux nouveaux usages numériques liés à l’intelligence artificielle (Gen AI, LLM, etc..) vont considérablement amplifier le problème, puisqu’ils augmentent de façon exponentielle, et ce, sans apporter de valeur en dehors de la puissance de calcul.
Vers la mise en place d’outils de mesure d’impact
Chez Sopra Steria, nous nous appuyons sur le modèle OPTE pour structurer notre approche :
- Organisation : pour aligner les structures de gouvernance de nos clients avec les réglementations pour prioriser les domaines d'amélioration RSE.
- Process : pour intégrer les meilleures pratiques écologiques tout en respectant les cadres d'éco-conception.
- Technology : pour industrialiser la collecte de données de mesure d'empreinte.
- Eco : pour accompagner les organisations dans une approche holistique.
La méthodologie OPTE fournit un cadre structurant pour aborder la sobriété numérique, mais son efficacité réside dans son application concrète au quotidien. C'est précisément là qu'interviennent la combinaison stratégique du FinOps et du GreenOps.
Ces deux approches agissent comme les deux faces d'une même médaille : le FinOps optimise les coûts financiers en éliminant les dépenses superflues, tandis que le GreenOps réduit l'impact écologique en minimisant les ressources consommées. Cette complémentarité naturelle crée un cercle vertueux : ce qui est bon pour la planète s'avère également bénéfique pour les résultats financiers.
Pour concrétiser cette double approche, les équipes de Sopra Steria s'appuient sur des plateformes de gestion innovantes des infrastructures (on-premise, privé, hybride ou public). Ces outils intègrent des solutions d’observabilité sophistiquées, d’automatisation, mais aussi de gestion du cycle de vie des infrastructures de FinOps et de GreenOps, pour approche plus durable. Le résultat est tangible et se manifeste par une optimisation des coûts opérationnels et une réduction simultanée de l'empreinte carbone.
De la théorie à la pratique : l’importance d’agir maintenant
La complexité du sujet peut sembler décourageante, mais l'inaction n'est plus une option. Les entreprises qui hésitent encore à s'engager dans cette voie doivent prendre conscience de deux réalités incontournables. Face à la complexité du sujet, quelles actions concrètes les organisations peuvent-elles entreprendre ? Se faire accompagner par des experts est primordial, au vu des risques qui sont réels et concrets.
Premièrement, le paysage réglementaire évolue rapidement. Avec l'entrée en vigueur de la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) et le développement de la taxonomie européenne sur la RSE, les exigences de transparence et de performance environnementale deviennent de plus en plus contraignantes. Le risque de non-conformité, avec ses conséquences financières et réputationnelles, est bien réel.
Deuxièmement, le marché lui-même est en constante mutation. Dans nos appels d’offres, on constate notamment que les questions liées à la consommation d'énergie représentent désormais plus de 20 % des exigences de nos clients. Une tendance qui ne fera que croître dans les années à venir.
Pour naviguer dans ce nouvel environnement, bénéficier d’un accompagnement devient non pas un luxe, mais bien une nécessité stratégique. L’expertise à la fois technique, méthodologique et réglementaire apportée par des experts fait bien souvent toute la différence entre une transformation réussie et une occasion manquée.
Quelques actions concrètes peuvent cependant être mises en place par les entreprises sans trop d’efforts :
- Gouvernance : déployer une stratégie globale de réduction des coûts liés à la stratégie RSE de l’entreprise applicable au système d’information, dont le cloud.
- Énergies renouvelables : choisir des fournisseurs qui utilisent des datacenters alimentés par des énergies renouvelables.
- Éco-conception : s’appuyer sur une approche d’éco-conception dès la phase de design des services cloud, dans le cadre d’une mise en place ou d’une transformation cloud.
- Orchestration intelligente : favoriser l’allocation intelligente des ressources (IaaS/PaaS) par la mise en place de l’automatisation du cycle de vie des ressources (Infra As Code, Teraform par exemple), le tout associé à la flexibilité offerte par le cloud (right sizing/auto scalling).
- Gestion du cycle de vie des ressources : mettre en place des stratégies de mise hors service automatique des instances inutilisées, et ajuster les capacités en fonction de la demande. Déployer de bonnes règles de « tagging » et de quotas sur les services associés aux organisations qui les consomment pour un suivi précis en temps réel.
- Virtualisation et conteneurisation : favoriser le déploiement de la virtualisation et surtout de la conteneurisation (Docker, Kubernetes) pour maximiser l’utilisation des ressources.
- Optimisation du stockage : Limiter la redondance excessive des données et archiver
efficacement pour réduire l’espace utilisé, mettre en place une approche de stockage hiérarchique en fonction des usages (tiering). - Calculateur carbone cloud : utilisation d’outils pour mesurer et ajuster les émissions de carbone.
- FinOps : Mettre en place une stratégie FinOps outillée permettant un pilotage fin des coûts.
Si l’on fait un focus sur l’IA, qui marque un changement majeur dans l’usage du cloud, les axes d’amélioration tournent principalement autour des axes suivants :
- Réduction de la charge de calcul en optimisant les modèles IA (quantification, pruning, distillation).
- Développent de modèles légers : utiliser des algorithmes plus efficaces comme les modèles IA sparsifiés pour réduire la consommation électrique.
- Déploiement Edge AI : effectuer le traitement IA sur des appareils locaux plutôt que sur le cloud, pour limiter les transferts énergivores.
- Inférence à l’échelle : mise en place d’outil de supervision des inférences permettant de piloter le rapport performance/prix/impact énergétique du passage à l’échelle des modèles d’IA.
À noter que les fournisseurs de datacenter et les hyperscalers ont d’ores et déjà entamé des actions pour réduire leur impact environnemental sur les domaines suivants :
- Utilisation d’énergie renouvelable.
- Manufacture des infrastructures utilisées, via une limitation des fournisseurs.
- Recyclage des plateformes hardware.
- Maintenance plus longue des plateformes.
- Réduction des coûts énergétiques (water cooling pour assurer le refroidissement des machines...).
- Gestion plus efficace des déchets...
Nul doute que dans la course à la sobriété numérique, les entreprises qui sauront mesurer avec précision et agir avec discernement prendront une longueur d'avance décisive.