Le législateur européen considère que les banques sont au cœur de la transition énergétique, car elles pourraient rediriger les flux de capitaux vers des projets durables, en finançant l'innovation verte et les énergies renouvelables. C’est ainsi que l’Europe a adopté les directives CRR III et le CRD VI qui imposent aux banques d’intégrer les risques climatiques dans leur gestion de fonds.
Dans ce cadre, l’Autorité Bancaire Européenne (EBA) a été chargée de clarifier l’application concrète de ces nouvelles directives et a publié des recommandations en janvier 2025, que nous nous attachons à décrypter dans cet article.
5 informations clés à retenir de ces nouvelles recommandations EBA
1. Définir une stratégie claire, robuste et sur le long terme
Les risques ESG devraient être au cœur des préoccupations des institutions financières. En effet, selon le dernier rapport du Forum Économique Mondial, les quatre risques majeurs des 10 prochaines années sont liés à l’environnement : événements climatiques extrêmes, perte de biodiversité, changements des systèmes terrestres, et pénurie de ressources naturelles.
Pour faire face à ces enjeux, l’EBA souligne l’importance d’une approche proactive et structurée pour identifier, mesurer et gérer ces risques. Elle recommande d'intégrer les risques ESG dans les processus stratégiques des institutions, notamment en allongeant l'horizon de planification à 10 ans et en testant leur résilience face à divers scénarios. Ces recommandations s’inscrivent aussi dans les nouvelles réglementations européennes CSRD et CSDDD.
Pour rappel, la CSRD oblige les entreprises à dévoiler leur impact ESG, tandis que la CSDDD les responsabilise sur la gestion des risques environnementaux et sociaux tout au long de leur chaîne de valeur. A noter que des débats sont actuellement en cours sur une simplification de la CSRD et un report de la CSDDD.
2. Adapter l’évaluation des risques ESG à l’entreprise et à son secteur
L'EBA insiste sur l'importance d'adapter la stratégie d’analyse, de reporting et de gestion des risques au contexte spécifique de chaque institution. Chaque analyse doit tenir compte de la taille, de la complexité de l’activité, des parties prenantes et des particularités du secteur.
Par exemple, une banque spécialisée dans les énergies fossiles sera plus exposée aux risques de transition qu'une banque dédiée aux énergies renouvelables. C’est pour anticiper ces risques que HSBC a annoncé en 2022 la fin du financement de nouveaux projets d’exploration pétrolière et gazière, en ligne avec les objectifs de neutralité carbone de l’UE et l=des engagements de la COP28.
3. Identifier et évaluer les risques
L’EBA recommande que les institutions évaluent les impacts des principaux risques ESG sur leurs finances, leur exposition et leurs bénéfices associés. Cela inclut les risques de transition (changements liés à la transition vers une économie bas carbone) et les risques physiques (impacts des événements climatiques extrêmes et du changement climatique à long terme).
L’EBA propose plusieurs options méthodologiques pour analyser ces risques :
- Basé sur l’exposition : Évalue l’exposition d’un portefeuille aux risques ESG selon les secteurs ou actifs.
- Alignement des portefeuilles et des portefeuilles sectoriels : Analyse l’alignement du portefeuille avec les objectifs climatiques et ESG du secteur.
- Basé sur les scenarios : Teste la résilience du portefeuille face à différents scénarios ESG, comme les changements climatiques.
4. Construire un plan structuré et cohérent pour accompagner la transition
L’EBA recommande aux institutions financières d’élaborer un plan de transition clair et structuré. Ce plan doit être aligné sur des obligations comme la due diligence (vérification des risques liés à la durabilité) et le reporting de durabilité (communication des impacts ESG).
Le plan doit inclure des objectifs précis, des actions concrètes et des cibles mesurables, fondées sur des scénarios scientifiques, par exemple les trajectoires définies par le Pacte Vert Européen, qui vise à rendre l'Europe neutre en carbone d’ici 2050, ou par le SBTI (Science Based Targets Initiative), qui aide les entreprises à définir des objectifs climatiques fondés sur la science.
Le plan doit inclure des objectifs précis, des actions concrètes et des cibles mesurables, en prenant en compte la situation géographique, la taille de l’organisation et les horizons temporels. L’EBA recommande une gouvernance claire, des indicateurs temporels et une stratégie de mise en œuvre adaptée aux enjeux à court, moyen et long terme.
5. Mettre en œuvre une gestion et une surveillance adaptées des données
Le suivi des risques ESG nécessite un suivi continu avec des indicateurs d’alerte précoce et des seuils à surveiller, notamment les revenus provenant de secteurs polluants (comme les énergies fossiles), les pertes passées et les prévisions de pertes financières ou encore la localisation des actifs clés.
L’EBA souligne l’importance de bien gérer les données : il faut collecter, structurer et analyser les données internes et externes, comme celles des parties prenantes.
Les institutions doivent aussi effectuer une due diligence, c’est-à-dire vérifier les pratiques des entreprises avec lesquelles elles travaillent, notamment sur les critères sociaux et de gouvernance, ainsi que le respect des lois et des réglementations.
Enfin, en l'absence de données précises, il peut être nécessaire de se fonder sur des jugements d’experts ou des évaluations qualitatives pour compléter l’analyse.
Se préparer face à ces nouvelles guidelines
Les recommandations de l’EBA fournissent un cadre conceptuel utile pour les banques dans leur gestion de l’ESG. L’EBA souligne l’importance cruciale des données ESG pour évaluer les risques, définir des scénarios et stratégies associées ainsi que pour anticiper les impacts financiers. Sans une collecte fiable et précise, il est impossible de gérer efficacement les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance. Un système de surveillance performant permet de suivre en temps réel les indicateurs clés, comme l’exposition aux secteurs polluants ou les risques physiques. Ce suivi garantit le respect des exigences réglementaires et renforce la résilience des institutions.
Certaines entreprises, comme Greenscope, offrent des solutions pour structurer, analyser et exploiter les données ESG efficacement, en utilisant des technologies avancées et de l’IA. Ces données étant collectées par les conseillers des banques auprès de leurs clients, l’absence d’un outil tel que Greenscope introduit une charge de travail importante. Ces outils permettent de faciliter la conformité avec les règlementations, en automatisant une partie du processus tout en fiabilisant les données.
Sopra Steria, avec son réseau de partenaires et son expertise en gestion de la donnée, est très bien positionnée pour accompagner les banques dans cette transition énergétique. En automatisant la collecte des données clients, leur structuration et le déploiement d’outils à grande échelle, ses experts ESG aident à construire des scénarios solides, à développer des stratégies performantes et à garantir des reportings conformes aux exigences réglementaires.