Les organisations réévaluent constamment leurs stratégies cloud pour répondre à des exigences de résilience, de conformité et de flexibilité opérationnelle. Alors que la décennie écoulée a été marquée par une migration massive vers les services cloud publics, un changement significatif est en cours. Les entreprises adoptent aujourd’hui de plus en plus des approches cloud hybrides.
Mais que signifie « hybride » dans ce contexte ? Le terme qualifie le fait de combiner les ressources cloud publiques avec une infrastructure privée pour créer des environnements plus robustes et adaptables.
Cette évolution reflète de nouvelles réalités : incertitudes géopolitiques, exigences réglementaires et compréhension profonde de la véritable valeur stratégique des différents modèles cloud.
Découvrez l’analyse de cette bascule et de ses conséquences, faite par nos experts en cloud hybride issus de notre division DPS Norvège : Roger Samdal et Kyrre Førli.
Du plan B au plan A : le basculement stratégique vers l'hybride
Pour nos experts, les motivations de l'adoption du cloud hybride ont fondamentalement changé ces dernières années. Ce qui a commencé comme un exercice d'optimisation des coûts a évolué en impératif stratégique.
« Nous avons observé un changement significatif au cours de l'année passée », explique Roger Samdal. « Auparavant, le mouvement consistait à moderniser l'infrastructure traditionnelle sur site pour tirer parti de l'innovation cloud.
Cependant, avec l'évolution de la situation géopolitique, nous observons un mouvement inverse. Les organisations qui utilisent déjà les clouds publics explorent maintenant les solutions hybrides pour une plus grande résilience. »
Cette inversion ne consiste pas à abandonner les services cloud publics, mais plutôt à créer des architectures plus équilibrées et résilientes. Kyrre Førli en identifie les facteurs clés : « En termes de valeur stratégique, la conformité et la résilience sont les deux principaux avantages que les organisations tirent de l'adoption du cloud hybride. »
Cette approche incarne la sagesse intemporelle qui nous impose de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier.
Pour les organisations opérant dans des environnements réglementés ou des secteurs d'infrastructure critique, le cloud hybride fournit la diversification nécessaire pour maintenir le système opérationnel en toutes circonstances. Il offre également une stratégie de sortie viable de tout fournisseur cloud unique, réduisant les risques de dépendance dans un paysage géopolitique incertain.
Cartographier votre parcours hybride
L'implémentation d'une solution cloud hybride nécessite une planification soignée et une compréhension claire des besoins organisationnels.
« La première étape essentielle consiste à comprendre parfaitement vos données et systèmes dans un contexte sécuritaire, en relation avec les réglementations et lois de votre pays », conseille Førli. « Vous devriez mener une analyse d'impact métier pour prioriser vos systèmes selon les besoins métier et de résilience, vous permettant de distinguer ce qui appartient au cloud public et ce qui devrait rester en local. »
Cette évaluation crée les fondations pour la prise de décision stratégique concernant le placement des charges de travail. Les systèmes à haut risque ou critiques pourraient devoir rester sur l'infrastructure privée, tandis que les charges de travail moins sensibles peuvent exploiter les capacités du cloud public.
Roger Samdal, qui a travaillé sur un projet avec un hôpital norvégien, estime qu’il s’agit là d’un exemple instructif. «Les équipes ont établi des paramètres clairs pour leur nouvelle architecture », partage Samdal. « Leur exigence principale était la capacité d'opérer indépendamment des services cloud publics pendant les situations de crise, tout en maintenant un environnement moderne et innovant qui offre une expérience similaire à celle du cloud public. »
Ce cas d'usage démontre comment les exigences spécifiques au secteur, comme le besoin pour les hôpitaux de fonctionner de manière autonome pendant les crises, peuvent orienter les décisions d'architecture hybride. Un environnement hybride bien conçu permet ainsi aux organisations de maintenir les services essentiels même lorsque les connexions externes sont compromises.
Briser les silos avant de construire des ponts
Bien que les implémentations techniques retiennent la plupart de l'attention dans les discussions autour du cloud, nos experts précisent que les facteurs organisationnels déterminent souvent le succès ou l'échec des initiatives cloud hybrides.
« L'implémentation technologique est en fait la partie la plus facile de l'adoption du cloud hybride », note Førli. « Le vrai défi réside dans la gestion du changement organisationnel. Cette transformation est chronophage et nécessite de nouvelles approches pour gérer simultanément les systèmes existants et les nouvelles technologies. »
Pourtant, beaucoup d'organisations sous-estiment cette complexité. D'autant que les structures de gouvernance nécessitent également une refonte. Comme l'explique Samdal : « Une gouvernance efficace nécessite une équipe d'ingénierie cloud unifiée responsable à la fois des composants publics et privés. Créer des silos est l'une des premières choses qui mènent à l'échec. Bien que vous ayez besoin d'expertise spécialisée pour chaque environnement, chacun doit opérer dans un cadre méthodologique unique. »
Cette approche unifiée prévient l'écueil commun de créer des équipes concurrentes avec des objectifs divergents. Au lieu de cela, les organisations devraient favoriser la collaboration entre les experts des systèmes legacy et les spécialistes cloud-native, donnant ainsi naissance à une vision partagée pour l'environnement hybride.
Le chemin vers le véritable hybride
Dès lors, comment les organisations peuvent-elles évaluer l'efficacité de leur approche cloud hybride ? Nos experts précisent les indicateurs clés d'une implémentation réussie.
« Dans une plateforme hybride idéale, vous pouvez déployer n'importe quelle application n'importe où, indépendamment de l'architecture sous-jacente », affirme Roger Samdal. « La vitesse de déploiement et l'expérience devraient être identiques que vous utilisiez la portion privée ou publique de votre infrastructure. »
Cette expérience fluide est la marque distinctive d'une solution hybride bien conçue. Les applications migrent facilement entre les environnements sans nécessiter de reconfiguration significative, fournissant une flexibilité et une résilience réelles.
En regardant vers l'avenir, les organisations devraient concevoir leurs environnements hybrides avec l'adaptabilité à l'esprit. Kyrre Førli pose le concept de « véritable hybride » comme principe directeur : « Le concept de "véritable hybride" implique d'implémenter le même plan de contrôle à travers toute votre plateforme. Cela crée une expérience fluide dans laquelle les utilisateurs n'ont pas besoin de considérer consciemment s'ils travaillent avec des ressources publiques ou privées. Cette approche unifiée est cruciale pour pérenniser l’infrastructure. »
Pour maintenir cette adaptabilité, les organisations devraient minimiser le vendor lock-in en exploitant les technologies open source lorsque c’est possible, et en maintenant la portabilité entre environnements. Le portefeuille applicatif devrait également évoluer vers des architectures plus orientées conteneurs et microservices qui peuvent s'exécuter de manière cohérente à travers différents environnements.
Clouds sans frontières : l'avenir de l'infrastructure flexible
Alors que les organisations naviguent dans un paysage numérique de plus en plus complexe, le cloud hybride offre une approche équilibrée qui répond simultanément à plusieurs objectifs stratégiques.
« Le cloud hybride offre la flexibilité pour répondre à pratiquement tout besoin ou défi métier », conclut Roger Samdal. « Il fournit aux organisations la résilience pour opérer en toutes circonstances tout en permettant encore l'innovation et la transformation. »
Mais alors que les architectures hybrides arrivent à maturité, une nouvelle question émerge : les exigences de cloud souverain vont-elles à nouveau remodeler ces stratégies hybrides ? Avec la priorité réglementaire accordée à la souveraineté des données, les organisations pourraient bientôt se retrouver à intégrer des éléments souverains dans leur équation cloud, en plus des composants publics et privés. Cela donnerait naissance à ce que nous pourrions appeler une approche « hybride-plus » pour le paysage numérique de demain.
Dans un monde en perpétuelle mutation, la véritable leçon est peut-être que l'hybridation elle-même (la capacité à mélanger, adapter et faire évoluer différentes approches) est non seulement une solution technique mais un principe fondamental pour naviguer dans l'incertitude.