Pour développer une véritable autonomie opérationnelle, les entreprises doivent repenser leur approche, selon Caspar Lund, responsable de l'IA chez Sopra Steria Norvège. Sommes-nous vraiment en marche vers des opérations autonomes, ou simplement installés dans le confort du numérique ? C'est la question que j'ai posée lors d'une récente conférence sur l'intelligence artificielle en Norvège. Mon message était clair : pour exploiter tout le potentiel de l'IA, nous devons oser penser différemment, radicalement différemment même, la façon dont nous dirigeons nos entreprises.
Numérisation vs Autonomie
Aujourd'hui, tout le monde parle de numérisation : capteurs, tableaux de bord, données. Mais le numérique n'est pas synonyme d'autonomie. La numérisation consiste à améliorer les processus existants grâce à la technologie. L'autonomie les réinvente. L'IA doit nous aider à décider, pas décider pour nous.
Il faut une personne un peu folle au sommet
Nicolai Tangen, directeur général du NBIM, l'a bien résumé dans une interview au journal VG (Verdens Gang) : « Il faut une personne un peu folle au sommet. Quelqu'un qui parcourt l'entreprise comme un forcené en demandant : pourquoi n'utilisez-vous pas l'IA ici et là ? » Et il a raison. Il faut quelqu'un qui parle d'IA à chaque pause et à chaque réunion de direction et qui ose remettre en question le fameux : « on a toujours fait comme ça ».
Dans de nombreux secteurs, on voit déjà se multiplier les initiatives numériques. Mais pour franchir le cap de la véritable autonomie, où les systèmes surveillent, apprennent et agissent sans intervention humaine, nous devons apprendre à concevoir nos opérations comme des écosystèmes d'IA, plutôt que comme de simples chaînes de processus.
Que signifie réellement l'autonomie ?
L'autonomie ne se résume pas aux robots ou aux drones. Elle consiste à utiliser l'IA pour prendre des décisions, accomplir des tâches et progresser en continu. Nous entrons dans une nouvelle phase : après l'analogique et le numérique, vient désormais l'autonome. Mais concrètement, que faut-il pour franchir cette étape ?
Il faut des systèmes basés sur l'IA capables de s'adapter en temps réel aux conditions changeantes. La détection automatique d'anomalies via des capteurs, caméras et modèles prédictifs est essentielle. Les solutions robotiques qui patrouillent les installations et signalent les irrégularités jouent un rôle crucial. Et les systèmes logistiques qui optimisent les itinéraires et les livraisons selon les données en temps réel comme la météo ou la demande complètent le tableau.
Mais pour que ces solutions ne restent pas de simples réussites isolées, il faut repenser nos modèles en profondeur.
Cinq conseils pour les entreprises prêtes à adopter une approche radicalement nouvelle
1. Oubliez les anciens processus et repartez de zéro. Ne cherchez pas à intégrer l'IA dans vos opérations actuelles. Demandez-vous plutôt : comment construirions-nous notre entreprise aujourd'hui, avec la technologie actuelle ?
2. Construisez des systèmes qui ne font pas qu'automatiser mais qui collaborent. L'autonomie naît lorsque les solutions d'IA sont interconnectées. Les opérations communiquent avec la maintenance, qui communique avec la logistique et ainsi de suite.
3. Laissez l'IA agir en temps réel. Ne dépendez pas d'une interprétation manuelle ; laissez le système réagir instantanément aux anomalies et aux opportunités.
4. Considérez les machines comme des collègues, pas comme de simples outils. Les robots et les agents d'IA travaillent. Imaginez une organisation où les humains et les machines unissent leurs forces pour progresser ensemble.
5. Partagez les problèmes et résolvez-les ouvertement. Identifiez clairement les défis et mobilisez vos partenaires ainsi que l'ensemble du secteur pour y répondre collectivement. L'avenir appartient à la collaboration.
Ce qui empêche les PDG de dormir la nuit
La réponse courte : l'incertitude, les risques opérationnels, les coûts et la volatilité. Mais il existe un chemin : faire de l'IA un levier de maîtrise, de clarté et d'innovation. Les opérations autonomes ne relèvent pas de la science-fiction : après le numérique, elles sont la suite logique. Et la vraie question est : souhaitons-nous être acteurs de cette transformation ou spectateurs de ceux qui la dirigent ?
Mon message à toutes les industries est clair : n'attendez pas, n'hésitez pas, commencez dès maintenant. Soyez cette personne « un peu folle » au sommet car cela peut aboutir à une toute nouvelle façon de faire fonctionner vos opérations : autonome, durable et compétitive, où technologie et personnes travaillent main dans la main.