Pour comprendre l’avenir de l’IA, nous avons demandé à plusieurs dirigeants de Sopra Steria Next UK de partager leur vision.
L’intelligence artificielle (IA) n’est plus seulement un mot à la mode, elle est en train de transformer les industries, d’améliorer notre quotidien et de repousser les limites de ce que la technologie peut accomplir. Elle bouleverse tous les secteurs en apportant des opportunités inédites et son lot de défis complexes. Mais à quoi ressemble réellement l’avenir de l’IA ? Et comment va-t-elle façonner le monde dans lequel nous vivons et travaillons ?
Nous avons interrogé plusieurs dirigeants de Sopra Steria Next UK sur leur vision de l'avenir de l'IA, les opportunités et défis qu'elle soulève, ainsi que les compétences clés pour réussir dans ce nouveau contexte.
Richard Caddick est directeur du conseil, Susannah Matschke est responsable de la croissance en data et IA, Gary Craven est responsable de la livraison data et IA. Le Dr Kevin Macnish est responsable de l’éthique et du conseil en développement durable et Gethin Leiba est consulting manager en data et IA.
Des répercussions industrielles aux aspirations individuelles, leurs analyses offrent un éclairage captivant sur le potentiel de transformation de l'IA. Plongez dans leurs réflexions et participez au débat sur l'avenir de notre monde numérique.
L'évolution de l’IA dans la décennie à venir
L'évolution de l'intelligence artificielle durant ces dix prochaines années s'annonce comme un véritable bouleversement pour tous les secteurs d'activité, repoussant les frontières de ce que nous pensions possible. Malgré les nombreux obstacles à surmonter, les spécialistes restent confiants quant au pouvoir de transformation de cette technologie.
Caddick établit un parallèle entre l'IA et l'avènement d'Internet, estimant que « l'IA représente la prochaine révolution majeure. Contrairement à Internet qui a créé un nouveau canal de communication, l'IA va métamorphoser l'ensemble de l'écosystème numérique ». Il conçoit l'IA comme « un service ou un instrument, non pas comme une finalité, mais comme un catalyseur pour optimiser notre travail dans de multiples domaines ».
Le Dr Macnish observe que « l’IA générative atteint déjà ses limites en matière de données provenant d’Internet », et à mesure que ses progrès ralentissent, « l’attention se portera davantage sur les méthodes d’apprentissage automatique traditionnelles pour corriger les défauts de cette IA ».
Leiba abonde dans ce sens et souligne qu’il faudra du temps pour relever les défis liés à la qualité des données et à la mise en production des projets IA. Il ajoute que « cinq à dix ans, c’est une longue période, et de sérieux obstacles se dressent, notamment le manque de données fiables et les difficultés à transformer des concepts en solutions déployables à grande échelle. »
Matschke ajoute que même si les organisations disposent de grandes quantités de données, « la qualité et l’exhaustivité sont essentielles pour obtenir des résultats fiables en IA. Or, la plupart des données n’ont pas été conçues en ce sens. Il y a donc un travail à faire pour les rendre exploitables ». Elle note aussi que les données synthétiques sont une alternative intéressante, mais qu’elles posent également des défis en matière d’équité, de biais et de spécificité.
Craven anticipe un bouleversement culturel avec l’IA, affirmant qu’elle « évoluera d’un simple assistant à un véritable collaborateur ». Il prévoit une généralisation à grande échelle dans les entreprises, y voyant une occasion de repenser les effectifs : « Les entreprises visionnaires pourront innover, non pas pour faire plus avec moins, mais pour réinvestir dans leurs talents, améliorer leurs services et créer de nouveaux produits. »
Malgré ces défis, Leiba reste convaincu que « l’IA dans son ensemble (pas seulement l’IA générative) s’imposera comme un élément central dans la plupart des processus, boostant la productivité et réduisant les temps de traitement ».
Opportunités et risques de l’IA
À mesure que l’IA s’ancre dans notre quotidien, elle offre des opportunités prometteuses mais soulève aussi des défis de taille. D’un côté, elle promet de transformer les industries et de démocratiser l’accès aux services, de l’autre, elle pose des enjeux sociétaux et éthiques majeurs.
Craven souligne cette dualité : « L'IA pourrait nous affranchir des corvées du quotidien et nous permettre de privilégier les relations humaines, mais elle risque aussi de nous rendre dépendants d'outils conçus pour accaparer notre attention, nous faisant perdre cette opportunité ». Il envisage des services publics parfaitement intégrés : renouvellement automatique des passeports, délivrance des actes de naissance accompagnée de l'inscription aux prestations sociales, prise de rendez-vous avec la sage-femme organisée dès la sortie de maternité. Toutefois, il insiste sur le fait que ces avancées ne seront possibles qu'avec la confiance des citoyens et une totale transparence.
Leiba met en garde contre les dangers liés au manque de données de qualité, à la centralisation de la propriété de l’IA, et à une dépendance excessive. Il considère « l’utilisation malveillante de l’IA, notamment via l’automatisation des campagnes de désinformation par des “fermes à trolls” », comme l’une des menaces majeures.
Matschke fait remarquer que « notre société n'a pas encore établi de cadre pour ces nouvelles technologies. Quand l'engouement initial se sera estompé, il nous faudra déterminer la meilleure façon de les intégrer dans nos vies ». L'éducation sera cruciale pour que l'IA soit comprise comme un simple outil et non comme une source de vérité incontestable.
Caddick évoque le risque d’uniformisation, puisque tout le monde a accès aux mêmes outils d’IA.
Le Dr Macnish, quant à lui, redoute une fracture numérique entre ceux qui auront accès à des services humains et ceux qui resteront cantonnés à l’IA. Autre inquiétude : « Je crains que les obligations de transparence, notamment celles de l’AI Act, soient difficiles à respecter pour les IA génératives et les réseaux neuronaux, ce qui pourrait poser des difficultés dans les années à venir. »
En somme, pour que l’IA ait un impact positif sur la société, il sera crucial de trouver un juste équilibre entre innovation et éthique.
Les compétences clés dans un monde transformé par l'IA
Avec la montée en puissance de l’IA, les compétences nécessaires pour réussir évoluent rapidement. Savoir utiliser efficacement les outils d’IA augmentera la productivité individuelle et le succès des entreprises. Mais comme le souligne Matschke : « Il est nécessaire de prévoir une formation spécifique à l’IA pour les employés, à l’échelle de l’entreprise mais aussi plus largement. »
Elle souligne que de nombreux utilisateurs de ces outils n’en connaissent pas les bonnes pratiques et ne savent pas comment maximiser leur efficacité, mais surtout en mesurer l’impact.
Le Dr Macnish rappelle qu’« interagir avec une IA diffère de l’utilisation d’un simple moteur de recherche », et ceux qui sauront faire la différence seront ceux qui sauront tirer leur épingle du jeu. Caddick ajoute que « la créativité et la pensée critique » seront indispensables pour utiliser l’IA de manière efficace sans perdre son discernement.
Leiba met l’accent sur « la culture des données et une solide compréhension des principes de l’IA », mais aussi sur l’importance de « recueillir les besoins des utilisateurs et les traduire en spécifications techniques. » Cela permettra de faire le lien entre les cas d’usage concrets et les possibilités offertes par la technologie.
Quant à Craven, il prédit un avenir où chaque employé gèrera une équipe d’agents IA, avec pour mission d’améliorer les services et de créer de nouveaux produits plus rapidement. Les compétences clés seront alors la résolution de problèmes, les relations humaines, la communication et la pensée critique : tout ce qui, en somme, est constitutif de notre humanité.
Quels sont les rêves de nos experts en matière d’outils IA?
Interrogés sur leurs outils d’IA rêvés, les experts se sont laissé aller à leur imagination.
Leiba rêve d’un outil capable « d’identifier vos besoins pour vos vacances, en se référant à vos préférences passées et en explorant Internet pour créer l’itinéraire parfait ».
Le Dr Macnish aimerait une maison totalement automatisée : lumières, bouilloire, cuisson…, mais rêve surtout d’une IA capable de « trouver des vaccins abordables et des traitements pour les maladies qui concernent les régions en développement ».
Matschke partage une citation qui l’a marquée : « Je veux que l’IA fasse ma lessive et ma vaisselle pour que je puisse écrire de la poésie et créer de l’art, pas que l’IA crée des productions artistiques pendant que je fais la lessive. »
Craven va plus loin en rêvant d’une IA qui gère la logistique du quotidien et permet aux gens de se consacrer à leurs passions : « une technologie portable surveillera ma santé, planifiera mes entraînements, détectera les risques de blessures, et réservera des événements selon mes goûts pour ensuite coordonner mon agenda avec les assistants IA de mes amis. »
En ce qui concerne Caddick, ses rêves d’IA dans la santé et la lutte contre le réchauffement climatique sont déjà en cours de réalisation.
Leçons clés de 2024
En évoquant les événements marquants de 2024, Macnish met en avant l’adoption de l’AI Act, qui intègre désormais une nouvelle section sur l’IA générative. Cela a déclenché de nombreuses discussions avec les clients sur la gouvernance et la culture IA. Gérer ces réglementations est désormais un métier reconnu, avec des certifications et de nouveaux débouchés. L’adoption de l’IA générative est plus lente que prévue, en raison, justement, du besoin de meilleure gouvernance et d’intégration maîtrisée.
Recommandations pour l’avenir
Dr Macnish recommande une approche holistique : d’abord analyser le besoin du secteur ou du métier et mettre en place le plan de déploiement et la gouvernance avant d’implémenter une IA. Il rappelle que « l’IA générative n’est pas la panacée, et qu’un hybride entre apprentissage automatique et IA générative pourrait être l’avenir ».
Matschke renchérit : les entreprises doivent d’abord « faire le travail de fond pour préparer leurs données avant de se lancer dans des outils IA coûteux et complexes ». Cette préparation évite la paralysie au stade du concept et permet un retour sur investissement plus solide.
En conclusion, l’avenir de l’IA est riche en promesses mais aussi en défis. En comprenant les opportunités, en anticipant les risques, en développant les compétences pertinentes et en adoptant une mise en œuvre réfléchie, nous pourrons exploiter son potentiel pour transformer notre monde pour le meilleur.